Le Dit du Genji (Genji monogatari) de Murasaki Shikibu est non seulement l’un des plus anciens romans au monde mais aussi un sommet de la littérature universelle. Il est généralement admis que l’histoire que raconte ce chef-d’œuvre du XIe siècle est avant tout celle d’un homme, le prince Genji, héros dont la beauté et le charme extraordinaires font succomber les dames de la Cour impériale durant l’époque de Heian (794-1185). 
Hayao Kawai, psychologue clinicien reconnu, réfute quant à lui cette interprétation. Il pense en effet qu’il est possible de lire cette œuvre comme l’histoire de la réalisation de soi par l’auteur elle-même. Selon son analyse, Murasaki Shikibu décrit les nombreux alter ego qui sont en elle au travers de personnages féminins : épouse, amante, fille, mère… Ce n’est que par commodité qu’elle a créé le personnage masculin de Genji dont le rôle se limite à celui de partenaire. 
Mais que devient cette œuvre si on considère que la femme est décrite en tant qu’individu à part entière et non pas en fonction de sa relation aux hommes ? Pour Hayao Kawai, la réponse se trouve dans les dix derniers chapitres de l’ouvrage : Le Dit du Genji devient alors le récit du processus de réalisation de soi par une femme, Murasaki Shikibu.

Né en 1928, Hayao Kawai, psychologue clinicien et professeur émérite à l’Université de Kyôto, occupe le poste de directeur général de l’Agence nationale japonaise pour la Culture depuis 2002. Après des études à l’Institut Carl Gustav Jung à Zurich, il est devenu le premier psychologue jungien japonais. Il est l’auteur de nombreux ouvrages.