Après 2 ans d’itinérance en Asie, Tôkyô, Séoul et Singapour, c’est enfin à Paris qu’est présenté cet ensemble exceptionnel de 70 peintures relatant l’aventure extraordinaire du voyage du mouvement cubiste dans toute l’Asie. 
L’Asie n’est pas une, le cubisme non plus. Cette exposition nous entraîne dans onze pays et nous montre les multiples façons dont le cubisme y a été perçu et réinterprété.
 
Né au début du XXe siècle autour de Picasso et de Braque, le cubisme est un mouvement décisif de l’histoire de l’art moderne. Il arrive en Asie à des époques diverses : dès les années 1910 pour le Japon, après la Seconde Guerre mondiale pour la Malaisie… Sa diffusion s’étend de l’Inde à la Chine, des Philippines au Vietnam. Style avant-gardiste, signe de décadence bourgeoise ou même ferment d’un art national, le cubisme a profondément marqué le développement de l’art moderne en Asie.
 
L’Asie est un concept géographique inventé par l’Occident comme une contrepartie à lui-même, et non pas fondé sur des principes communs inhérents à cette région du globe. Le cubisme n’y apparaît pas de manière uniforme : brusques ruptures et élans accompagnent ce processus mouvant, dans des contextes sociaux, économiques et culturels très différents. Son introduction se fait par des biais extrêmement variés eux aussi : articles et reproductions d’œuvres européennes dans la presse ; professeurs anglais, hollandais ou français enseignant l’art occidental dans les pays colonisés ; jeunes artistes ayant étudié en Europe auprès de Lhote ou de Léger…
 
 
L’ordre de présentation des œuvres de l’exposition suit le développement historique du cubisme en Asie. Ce style originaire de France arrive au Japon après 1910, souvent amalgamé avec le futurisme italien et l’expressionnisme allemand. Il apparaît à Shanghai, métropole cosmopolite, dans les années 1920. Dans les années 1930, il reçoit un accueil mitigé en Corée en raison de son « incapacité à exprimer des émotions poétiques ». En Inde, il est mieux accepté du fait de ses similitudes avec la peinture traditionnelle. En Asie du Sud-Est, la création d’œuvres cubistes s’étend de la fin des années 1940 à l’ensemble des années 1950 : elle coïncide avec la fin de la domination occidentale et la constitution des pays de cette zone en nations modernes.
 
Existe-t-il cependant des traits communs à un cubisme asiatique ? La caractéristique la plus commune est sans doute la division d’un tableau en différentes facettes de couleur. Mais cette peinture va rarement jusqu’à la quasi-absence de couleurs du cubisme analytique. Elle ne multiplie pas non plus les angles de vue comme le premier cubisme.
Il s’agit d’un style moins cubiste que « semblable au cubisme ». 
Comme leurs homologues européens, les cubistes asiatiques composent des natures mortes et des portraits, mais ils transforment avant tout les motifs propres à leurs traditions : paysages, architectures, scènes de la vie quotidienne… Les allusions politiques ne sont pas rares, ni les sujets religieux tels que les Christ en croix aux Philippines.
La recherche menée par les peintres asiatiques n’est donc pas une adaptation du cubisme mais un élargissement de son potentiel stylistique. 
 
Cette exposition a été présentée à Tôkyô, Séoul et Singapour de 2005 à 2006. Elle est organisée avec le soutien du National Museum of Modern Art de Tôkyô, du National Museum of Contemporary Art de Corée et du Singapore Art Museum. Sa réalisation a nécessité de nombreuses recherches et enquêtes menées dans plusieurs pays d’Asie.