La porcelaine japonaise naît dans la région d'Imari, au nord de l'île méridionale du Kyûshû, dans les années 1610. En l'espace de 40 ans, de 1610 à 1650, les artisans japonais vont développer des techniques de fabrication extraordinaires qui feront du Japon le plus important exportateur de porcelaine en Europe.
Jusqu'au début du XVIII e siècle les shôgun japonais et les cours européennes se disputent les porcelaines d'Imari. Les différences des formes, des décors et des types de porcelaine font écho aux modes de vie et aux critères esthétiques d'Orient et d'Occident. Ainsi, les luxueuses porcelaines commandées à prix d'or par l'aristocratie européenne contrastent avec celles, non moins précieuses, qui étaient offertes aux shôgun Tokugawa. 
 
La Maison de la culture du Japon à Paris présente un ensemble exceptionnel d'une centaine de pièces provenant de grandes collections japonaises et européennes. En confrontant pour la première fois ces pièces, l'exposition fait apparaître les différences de goût entre le Japon et l'Europe tout en retraçant l'aventure de la porcelaine d'Imari des années 1610, jusqu'aux années 1750, où elle est exportée en abondance et imitée dans les plus grandes manufactures européennes.

L'exposition s'organise en quatre parties. 

Naissance et développement des porcelaines d'Imari.
C'est en Chine, au VIe siècle, que naît la porcelaine blanche et dure, créée grâce aux techniques de poterie les plus élaborées. Alors que ces procédés de fabrication gagnent la Corée, le Japon reste longtemps incapable de produire ses propres porcelaines et doit, jusqu'au XVIe siècle, les importer principalement de Chine. De 1592 à 1598, lors de tentatives de conquête de la Corée menées par Toyotomi Hideyoshi, le plus puissant chef militaire du Japon, les guerriers du clan Nabeshima ramènent sur leurs terres, dans l'île méridionale du Kyûshû, des potiers coréens. En 1610, ces artisans réussissent à fabriquer les premières porcelaines japonaises à Arita, cité proche d'Imari, où ils ont découvert un gisement de kaolin. Les pièces à décor en bleu de cobalt sous couverte constituent l'essentiel de cette production.
 
En Chine, les guerres civiles qui éclatent lors du passage de la dynastie des Ming à celle des Qing entraînent la chute brutale des exportations de porcelaines à partir de 1644. Les potiers de la région d'Imari saisissent l'occasion pour accaparer le marché japonais et commencent même à exporter en Asie du Sud-Est vers 1647. Au début des années 1650, la production des porcelaines d'Imari bénéficie de remarquables innovations techniques : l'application des motifs polychromes sur couverte donne naissance à des objets éclatants de couleur et un procédé de façonnage des pièces permet une finesse inégalée de la porcelaine.
 
Porcelaines pour les shôgun, porcelaines pour les souverains d'Europe : quand la variété des formes et des décors reflète les différences en matière de goût et mode de vie. 
A l'époque d'Edo (1603-1868), les shôgun Tokugawa sont les personnages les plus puissants du Japon. Afin de montrer sa soumission au gouvernement du shôgun, le clan  des seigneurs Nabeshima, basé dans la région d'Imari, lui réserve sa production de porcelaines dont la qualité exceptionnelle en fait un cadeau de choix. Ces pièces de dimensions modestes et aux décors stylisés reflètent le goût des shôgun puisqu'elles ne devaient pas être commercialisées, et encore moins exportées. La composition asymétrique de certaines porcelaines est aussi très caractéristique, de même que les motifs comme la toile d'araignée, le héron, les fleurs de camélia...
A la même époque, les porcelaines d'Imari commandées par la Compagnie Hollandaise des Indes Orientales à la demande des nobles d'Europe sont des pièces correspondant au goût occidental. Plus grandes que les pièces destinées au marché intérieur, elles ont une palette de couleurs plus variée et sont richement ornées de décors conçus pour l'exportation : paysages européens, motifs floraux disposés symétriquement... Ces décors aux couleurs éclatantes et traités de façon réaliste sont caractéristiques des pièces de style Kakiemon qui ornaient les cabinets de porcelaines des aristocrates européens.
 
Chefs-d'oeuvre d'Imari pour les souverains et aristocrates européens 
Suite à la considérable réduction des exportations de porcelaines chinoises à partir de 1644, des porcelaines d'Imari sont fabriquées spécialement pour le marché européen dès 1658.
La porcelaine d'Imari acquiert alors un nouveau statut. Son exotisme, sa perfection, sa rareté (rien d'équivalent n'existe en Europe et la technique de fabrication est encore inconnue) en fait la vaisselle par excellence des cours royales.
Convenant aux modes de vie des Européens, elles sont d'une extrême variété : vaisselle de table, services à café, à thé ou à chocolat – trois boissons nouvellement introduites en Europe –, brocs à bière, plats à barbe, bibelots... Parmi les objets décoratifs destinés aux palais et aux résidences, les plus imposants sont les potiches aux couvercles ornés de figurines très élaborées.
Les décors de ces porcelaines sont chargés et les motifs d'inspiration occidentale tels que les scènes mythologiques et les vases garnis de fleurs ne sont pas rares.
 
Les copies européennes des porcelaines d'Imari
C'est Auguste II le Fort, électeur de Saxe, roi de Pologne et grand collectionneur de porcelaines japonaises, qui contribue à percer le secret de fabrication de la porcelaine. En 1709, Böttger, un savant, parvient à sa demande, à créer de la porcelaine dure dans les fours de Meissen. Ces techniques de fabrication se répandent alors dans tout le continent européen et les porcelaines de style Kakiemon sont très vite imitées à la perfection. 
Dans cette dernière section sont mises en regard des porcelaines d'Imari et leurs étonnantes copies réalisées par les manufactures de Delft, Sèvres, Chelsea, La Haye.