Les 24 saynètes qui composent Le grenier traitent d’un problème très actuel : celui des hikikomori, ces jeunes qui décident de ne plus quitter leur chambre. Sakate propose à travers le microcosme du « grenier », un voyage sensible et délirant au cœur du Japon d’aujourd’hui. Cette pièce est donc la métaphore de l’absence de liberté qui règne dans la société nippone pourtant en apparence plus libre que jamais. Satire féroce qui se déroule dans l’espace clos d’un « grenier » qu’une entreprise vend en kit sur internet à tous ceux qui veulent vivre isolé dans un espace confiné. Une série de personnages vont se succéder dans ce lieu restreint et y croiser des visiteurs : une jeune fille qui écrit son journal, une famille de sans-abri, des samouraïs surgis du passé, des explorateurs…
Sakate combine avec virtuosité le superflu et le sérieux, le mondain et le lyrique. De petites perles d’humour noir ou absurde émaillent un texte profond qui séduit l’auditoire par sa force d’attraction. Finalement, ceux qui ont choisi l’enfermement n’ont-ils pas une conscience plus aiguë de leur liberté que ceux prétendus « libres » ? Drôlerie, émotion et poésie pour une pièce digne d’un rêve d’enfant, universelle à plus d’un titre, qui s’achève sur le bruit du vent soufflant sur les ténèbres. Essentiel.
 
Auteur et metteur en scène, Yôji Sakate a créé sa compagnie Rinkogun en 1983, alors que le Mouvement des petits théâtres se développait autour d’une multitude de compagnies indépendantes. Sakate reste, à 45 ans, une figure majeure du renouveau de la scène japonaise. Son théâtre explore les problèmes sociaux, aborde des sujets tabous, des dossiers sensibles : l’envoi de soldats japonais en Irak, l’homosexualité féminine à Tôkyô, les mines anti-personnel... Autant de sujets graves traités le plus souvent avec ironie. Sakate a reçu de nombreux prix prestigieux dont celui du meilleur metteur en scène du Yomiuri Shimbun à plusieurs reprises.